Un syndicat de copropriétaires est-il recevable d’office à contester un permis de construire, même si son syndic n'était pas habilité à agir en justice ?

(Conseil d’Etat 9 avr. 2025, n° 492236)
En résumé :
Dans un récent arrêt, le Conseil d'État a annulé une décision du Tribunal Administratif de TOULON qui avait déclaré irrecevable d’office l'action en nullité d'un permis de construire initiée par un Syndicat des copropriétaires, au motif que le syndic n'avait pas été dûment habilité à agir par l'assemblée générale.
Cette décision offre l'opportunité de réexaminer les dispositions en vigueur concernant l'habilitation du syndic et les conséquences d'un défaut de celle-ci.
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Pour aller plus loin :
Une fois n’est pas coutume, c’est le juge administratif qui, dans le cas d’espèce, a eu à interpréter les dispositions de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et son décret d’application en date du 17 mars 1967, profondément réformé par le décret n°2019-650 du 27 juin 2019.
Dans le cadre de cette affaire, un syndicat des copropriétaires a intenté un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif. L'objectif était d'obtenir l'annulation d'un arrêté municipal par lequel le maire avait accordé un permis de construire, incluant une division parcellaire, pour l'édification de trois maisons individuelles et la rénovation d'une villa.
Les juges du fond ont rejeté cette requête, la déclarant irrecevable. Cette décision a été motivée par le moyen relevé d'office, tiré du défaut d'autorisation accordée au syndic par l'assemblée générale des copropriétaires.
Saisi en appel, le Conseil d'État a par la suite annulé la décision rendue et a ainsi rappelé qu’en vertu de la loi du 10 juillet 1965 et son décret d’application du 17 mars 1967 dans sa rédaction résultant du décret du 27 juin 2019 :
- le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant (...)”, (article 15 loi 10 juillet 1965)
- “le syndic est chargé, dans les conditions qui seront éventuellement définies par le décret prévu à l'article 47 ci-dessous : (...) - de représenter le syndicat dans tous les actes civils et en justice dans les cas mentionnés aux articles 15 et 16 de la présente loi (...) ". (article 18 loi 10 juillet 1965)
- le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale. / Seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice. " (article 55 décret du 17 mars 1967)
Le Conseil d’État rappelle donc que dans les cas où une autorisation est requise, le syndic, agissant au nom de la copropriété, est tenu de disposer d'une autorisation formelle de l'assemblée générale des copropriétaires pour agir en justice en son nom, habilitation qui doit préciser l'objet et la finalité du contentieux engagé.
Toutefois, le moyen tiré du défaut d'autorisation du syndic à agir en justice ne peut toutefois être soulevé que par un ou plusieurs copropriétaires, de sorte qu’en relevant ce moyen d’office, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.
L’occasion de rappeler que l’habilitation préalable du syndic n’est pas requises pour “les actions en recouvrement de créance, la mise en oeuvre des voies d'exécution forcée à l'exception de la saisie en vue de la vente d'un lot, les mesures conservatoires, l'opposition aux travaux permettant la recharge normale des véhicules électriques prévue à l'article R. 136-2 du code de la construction et de l'habitation et les demandes qui relèvent des pouvoirs de juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat. Elle n'est pas non plus nécessaire lorsque le président du tribunal judiciaire est saisi en application des premiers alinéas des articles 29-1A et 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 ou du premier alinéa de l'article L. 615-6 du code de la construction et de l'habitation.”