L'exercice d'une activité contraire au règlement de copropriété constitue-t-il un trouble illicite ?

En résumé :

 

La troisième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 18 janvier 2023, considère que l'exercice d'une activité interdite par un règlement de copropriété, en ce qu'elle serait contraire à la destination de l'immeuble, caractérise l’existence d’un trouble manifestement illicite.

 

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Pour aller plus loin :

 

Dans cette affaire, un syndicat des copropriétaires a assigné en référé au visa de l’ancien article 809 alinéa 1er du code de procédure civile (désormais, CPC, nouv. art. 835, al. 1er) deux copropriétaires d’un lot (lot n° 2) à retirer divers objets déposés sur leur terrain (encombrants, épaves de véhicule, détritus, containers) et à cesser une activité de fabrication d’achards.

 

Par ordonnance du 27 novembre 2020, le tribunal de première instance de Nouméa, statuant en référé, déboute le syndicat des copropriétaires de ses prétentions notamment au motif que le règlement de copropriété n’interdit pas expressément l’activité de fabrication d’achards et que les objets déposés sur le terrain du lot n° 2 ne sont pas encombrants et ne causent aucune nuisance au voisinage.

 

Le syndicat des copropriétaires relève appel de l’ordonnance du tribunal de première instance de Nouméa et demande, entre autres, à la Cour d’appel de Nouméa à ce qu’il soit enjoint aux copropriétaires du lot n° 2 de cesser l’activité de fabrication d’achards et à l’enlèvement des buttes de terre.

 

La Cour d’appel de Nouméa reconnaît que selon le règlement de copropriété, la destination de l’immeuble poursuit, à titre principal, un usage d’habitation. En outre, si le règlement de copropriété autorise l’exercice de professions libérales, elle précise que : “a priori, l’activité [de fabrication d’achards] exercée par les [copropriétaires du lot n° 2] est interdite par le règlement de copropriété ”.

 

Cependant, la juridiction d’appel, juge de l'évidence, poursuit en indiquant que dans cette affaire que : 

 

  • le copropriétaire du lot n° 1 a acquiescé à l’ouverture d’un laboratoire sur le lot n° 2 ;
  • le copropriétaire du lot n° 3 exerçait une activité de culture de plantes à épices, aromatiques, médicinales et pharmaceutiques, contraire au règlement de copropriété. 

 

Partant, elle en déduit que les copropriétaires font “une lecture souple” du règlement de copropriété et c’est cette même lecture qui prive le juge des référés de retenir la présence d’un trouble manifestement illicite caractérisée par l’exercice d’une activité de fabrication d’achards pourtant contraire au règlement de copropriété. Seule la juridiction statuant au principal pourrait connaître de la demande tendant à la cessation de l’activité des copropriétaires du lot n° 2. Par voie de conséquence, elle confirme l’ordonnance du tribunal de première instance de Nouméa en rejetant la demande du syndicat des copropriétaires.

 

Le syndicat des copropriétaires forme un pourvoi en cassation. Il soutient que l’exercice d’une activité interdite par le règlement de copropriété  - en ce qu’elle est contraire à la destination de l’immeuble - caractérise à lui-seul un trouble manifestement illicite.

 

La troisième chambre civile de la Cour de cassation fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires - au visa des articles 8 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et 809 ancien du code de procédure civile - et considère que la juridiction d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations. L’activité de fabrication d’achards dès lors qu'elle est contraire au règlement de copropriété, caractérise un trouble manifestement illicite.

 

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