L'effondrement d'une construction permet-il toujours une reconstruction à l’identique ?

Un bâtiment ne peut être reconstruit à l'identique sur le fondement de l'article L.111-15 du code de l'urbanisme si l'effondrement résulte de travaux précédemment entrepris (CE 13 avril 2018, n°414661)

 

Un particulier obtient par arrêté du maire de Marseille en date du 17 juillet 2017 un permis de construire portant démolition, reconstruction et surélévation d'une construction existante pour permettre la réalisation de travaux de surélévation et de reconstruction de la maison qui s'est effondrée à l'occasion des travaux de surélévation précédemment entrepris.

 

Une voisine dépose un recours pour excès de pouvoir et sollicite, en référé, la suspension sur le fondement de l’article L.521-1 du code de justice administrative sur le fondement de la violation de l’article L.111-15 du code de l’urbanisme(1) et des dispositions de l'article UR12 du règlement du PLU de Marseille en matière de réalisation d'aire de stationnement.  

 

Par ordonnance n°1706007 en date du 13 septembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille suspend l’exécution de cette décision, jugeant que les moyens soulevés par la requérante sont de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de l’autorisation querellée.

 

A la suite du pourvoi de la commune de Marseille, le Conseil d’Etat confirme la décision rendue en référé par le tribunal :

 

Le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a pu, sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier, retenir en l'état de l'instruction comme de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire en cause le moyen tiré de ce que les travaux litigieux de reconstruction et de surélévation de la maison d'habitation de Mme B..., à la suite de son effondrement au cours des travaux de surélévation précédemment entrepris, ne pouvaient être autorisés sur le fondement de l'article L.111-15 du code de l'urbanisme”.

 

Cette affaire est l'occasion, pour le Conseil d'Etat,  de préciser les conditions d’appréciation de la notion de bâtiment détruit ou démoli au sens de l’article L.111-15 du code de l’urbanisme, laquelle n’inclut pas l’effondrement résultant de la réalisation de travaux de surélévation sur une construction existante. Dans une telle hypothèse le pétitionnaire doit solliciter un nouveau permis de construire et une autorisation de démolition (ou un permis de construire valant démolition). Cette décision, rendue en référé, devra toutefois être confirmée par le juge du fond, étant rappelé que cette notion relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.

 

Par ailleurs, cette décision semble revenir à une jurisprudence antérieure au terme de laquelle le droit de reconstruction à l'identique est inapplicable en cas d'immeuble détruit à l'occasion de travaux importants. Rendue sous l'empire de l'ancien régime lorsque le droit à reconstruction à l’identique était réservé aux destructions causées par un sinistre(2), cette décision du Conseil d'Etat semble vouloir dessiner une limitation du nouveau champ d'application de l'article L.111-15 du code de l'urbanisme.

 

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(1) “Lorsqu'un bâtiment régulièrement édifié vient à être détruit ou démoli, sa reconstruction à l'identique est autorisée dans un délai de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement”.

 

(2) La loi n°2009-526 du 12 mai 2009 a élargi l’application de l’article L.111-15 (ancien article L.111-3) du code de l’urbanisme à l’ensemble des constructions démolies.